Grande Tête de l'Obiou : sommet et versant oriental

l'éperon septentrional du Dévoluy, côté Drac

 Vu du côté oriental, notamment depuis les deux rives de la vallée du Drac (par exemple depuis la N.85 au nord de Corps), le sommet de l'Obiou (2789 m) apparaît comme une splendide étrave rocheuse, s'avançant en promontoire vers le nord au dessus du sillon subalpin.


Le versant est des crêtes sommitales de l'Obiou vu de l'est, depuis le sommet de Côte Rouge (montagnes du Beaumont).
L'éperon nord du sommet sépare deux petits cirques qui ont dû héberger des appareils glaciaires locaux mais qui sont maintenant exclusivement tapissés d'éboulis. La hauteur totale des abrupts, totalement formés de calcaires sénoniens, est de 700 m, ce qui représente à cet endroit à peu près l'épaisseur totale de cette puissante formation.
On y distingue bien le pendage vers l'avant gauche (c'est-à-dire vers le sud-est) de toutes les couches.



étymologies probables: "lo Baou" = le sommet rocheux (cf. Les Baux de Provence, d'après Paul-Louis Rousset) ;
"Lopiou" = dalles inclinées, lapiaz, (d'après André Francés)
très improbable : "testo do Biou" (= Tête de Boeuf , d'après Albert Dauzat)
"Le beau" = proposition fantaisiste, inspirée par la prestance du sommet ...

En fait ce sommet est situé sur une crête secondaire, d'orientation E-W, qui se détache (au Bonnet de l'Évèque) de l'arête principale du long chaînon occidental du Dévoluy : ce dernier, orienté N-S, sépare la dépression centrale du Dévoluy et la vallée du Drac au niveau du Beaumont, à l'est, de la dépression du Trièves, à l'ouest (voir l'autre versant de cette crête à la page "Obiou ouest").

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Le versant est du chaînon de l'Obiou
, vu du NE, d'avion, depuis l'aplomb de Saint-Michel en Beaumont.


Les arêtes sommitales de l'Obiou ainsi que la crête de Rattier, qui prolonge de plus de 1 km vers le nord l'éperon rocheux de la crête principale de partage des eaux, sont entièrement formés par les calcaires du Sénonien. Par contre du côté sud-oriental, au nord de la falaise puissante et continue qui, depuis la Tête de Lapras, rejoint le défilé de la Souloise (voir page"Saint-Disdier") l'érosion a dégagé le soubassement oriental de cette crête : celui-ci, formé par le Crétacé inférieur marno-calcaire et surtout par les calcaires de la barre Tithonique, donne un relief de mamelons boisés séparés par de profonde ravines (Jenabran, ravin de la Laisse).

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Le chaînon de l'Obiou et le débouché de la vallée de la Souloise vus du sommet du Gargas (La Salette).
s.sD = synclinal N-S de Saint-Disdier (vu pratiquement à 90° de son axe) ; s0 = pendage des couches sénoniennes du chaînon de l'Obiou ; s.C = synclinal NE-SW des Chalances (vu pratiquement selon son axe).


Plus au nord encore, à partir du col de l'Aiguille de Bachillianne, l'érosion a décapé totalement la chape sénonienne et a alors sculpté l'arête même du chaînon dans son soubassement (voir les pages "Châtel" et "Cordéac"), ce qui lui confère un relief bien moins acéré.

Immédiatement à l'aplomb nord-oriental du sommet les hauts ravins du ruisseau de la Laisse entaillent le substratum de la transgression sénonienne, sous le rebord de falaise de la crête secondaire des Chalances, formé par la masse inférieure du Sénonien. Ils montrent que ses couches y sont affectées par un synclinal des Chalanches au cœur duquel affleurent des marnes bleues.

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Le versant nord du col des Faïsses et le sommet de l'Obiou, vus de l'est depuis le chalet des Balmes.
Ds= discordance basale du Sénonien ; s.C = synclinal des Charances (axe proche de E-W).




Coupe simplifiée du rebord occidental du Dévoluy, à la latitude de l'Obiou

par M. GIDON (extrait de la légende de la carte au 1/50.000° Saint-Bonnet, retouché)
légende des couleurs


Au sud-est de l'Obiou, du côté oriental de la crête de partage des eaux, la dalle sénonienne n'est plus entaillée par l'érosion : elle descend, à partir de la Tête de Lapras, avec un pendage modéré (de l'ordre de 20°), jusqu'au fond du synclinal de Saint-Disdier. Elle ne forme cependant pas une dalle structurale car elle a été partiellement entaillée en crêtes secondaires, orientées vers l'E-SE, par des vallons, eux aussi allongés perpendiculairement à la crête principale. Leur pente reste sensiblement comparable à celle des couches de sorte que leur plancher n'atteint nulle par le soubassement du Sénonien et ne montre, comme leurs versants, que les strates du Sénonien parfois mises à nu en dalles structurales par l'érosion glaciaire.

Ces vallons ont en effet été aménagés par des glaciers locaux qui leur ont conféré un modelé bien typique (voir la page "paysages glaciaires du Dévoluy").

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Le versant sud-oriental du chaînon de l'Obiou vu du sud-est, d'avion, depuis l'aplomb du col Rabou (Saint-Disdier se situe à peu près à l'emplacement du mot "Souloise").
La puissante dalle des calcaires sénoniens plonge vers l'observateur (vers l'est), un peu plus fortement que la surface topographique, de sorte qu'elle est recouverte par le Nummulitique dans les pentes de la vallée d'Agnières (dont le fond est caché derrière le Puy de Rioupes), jusqu'à Saint-Disdier.
Les vallons de Truchière, des Narrites et du Mas sont autant d'anciens cirques glaciaires, abandonnés à la fin du retrait de la glaciation würmienne.


 


L'examen rapproché de la pyramide sommitale de l'Obiou montre d'abord combien sa structure est simple, pratiquement monoclinale, avec un pendage modéré de toutes les couches. Ce pendage est celui du flanc ouest du synclinal de Saint-Disdier, dont l'Obiou ne représente finalement qu'un fragment (en forme de volet* isolé par l'érosion). C'est pourquoi les falaises de l'Obiou s'abaissent progressivement vers le sud-est de façon continue, en dépit des incisions capricieuses de l'érosion, jusqu'au niveau du lit de la Souloise (voir la page "Basse Souloise" ).
Toutefois, à l'Obiou l'inclinaison des couches n'est plus orientée vers l'est, comme au sud de Saint-Disdier, mais franchement vers le sud-est : cette inflexion d'azimut est due au relèvement axial vers le nord qui affecte ici le pli (ce qui se traduit également par un surhaussement progressif, du sud vers le nord, des couches du soubassement anté-Sénonien).

 Cette remontée générale des couches, parallèlement à celle de l'axe du synclinal, est, bien sûr, la cause essentielle de la disparition des couches sénoniennes en direction du nord. C'est un mouvement d'échelle régionale, qui se poursuit jusqu'à La Mure, où il se manifeste par la mise au jour du Jurassique inférieur au cœur du synclinal (qui correspond là à l'hémigraben de la Matheysine) et au delà, avec la surrection du socle cristallin de Belledonne à partir de la vallée de la Romanche. Il se manifeste aussi plus à l'ouest, où l'anticlinal du "dôme de la Mure", qui borde la Matheysine du côté ouest, s'ennoie vers le sud dans le Jurassique moyen de l'anticlinal de Saint-Jean d'Hérans, puis sous les Terres Noires de la dépression anticlinale du Trièves oriental.


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L'extrême sommet de l'Obiou, vu d'avion, de l'est.
Le petit plateau sommital qui couronne l'entablement des bancs du sommet est formé par un banc de conglomérats qui représente le niveau le plus récent du Sénonien (voir la page "faciès du Sénonien"). Ces couches s'observent en effet ailleurs sous les premières couches du tertiaire ; elles se sont formées par dislocation et resédimentation sur place, pendant l'émersion du Sénonien terminal.
L'arrière-plan est formé par les crêtes de Jurassique supérieur et de Crétacé inférieur des confins orientaux du Diois (Jocou, col de Menée) et, à droite, par la dépression anticlinale des Terres Noires du Trièves.



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L'extrême sommet de l'Obiou, vu d'avion, de l'ouest
Cette vue montre, en arrière-plan, le rebord septentrional de la dalle sénonienne qui cerne la cuvette du Dévoluy (voir la page "Sambut").
Les falaises septentrionales du Pic Pierroux semblent prolonger celle du sommet de l'Obiou, ce qui est vrai à ceci près que, entre les deux, passe la vallée de la Souloise. Cela montre en outre que les unes et les autres gagnaient en altitude de façon similaire vers la gauche, c'est-à-dire vers le nord, où l'on se dirige en effet vers la zone surélevée du Dôme de La Mure. Ce relèvement des couches vers le nord les exposait de plus en plus à l'érosion, alors qu'elles ont été conservées plus au sud, où elles s'abaissaient jusqu'au cœur de la cuvette du Dévoluy.


Au pied est de la pyramide terminale, à proximité du sentier qui monte depuis le col des Faïsses au col du Petit Obiou, une des grottes du pied de falaise (La "Baume de Jalabres") a révélé un remplissage de conglomérats fluviatiles à ciment rouge (voir http://planet-terre.ens-lyon.fr/article/galets-Obiou.xml).
A priori on pouvait penser qu'il s'agissait d'une cavité karstique ouverte à l'éocène et qui aurait reçu occasionnellement, à cette époque, des alluvions transportées par des torrents descendant des reliefs, émergés et érodés, du massif du Pelvoux : en effet des conglomérats très similaires sont connus à la base de la couverture tertiaire de ce massif (voir la page "Champsaur" de la section "Drac"). Toutefois on y trouverait des galets de calcaires à Nummulites et les mesures géophysiques d'âge d'enfouissement faites par les auteurs fournissent un âge de 5,6 ± 1,5 Ma (c'est-à-dire de la limite Mio- Pliocène) ... 

En contrebas oriental du sommet de l'Obiou se développe l'important replat d'alpages du col des Faïsses. Celui-ci est constitué, assez paradoxalement compte tenu de son altitude supérieure à 1600 m, par une vaste nappe de cailloutis qui s'étend sur plus de 1 km d'ouest en est et plus de 500 m au nord du col.

 Ces cailloutis, cimentés par de la calcite, sont stratifiés, avec un pendage modéré de l'ordre de 15° vers l'est, relativement calibrés (forte prédominance de cailloux décimétriques) et comportent quelques galets arrondis : ils témoignent d'un épandage semi-torrentiel en nappe, fort ancien, se raccordant avec un fond de vallée considérablement plus élevé que celui actuel du Drac : on peut en conclure que leur âge est vraisemblablement antérieur à la glaciation de Mindel.



Le Rocher des Balmes vu du nord depuis la piste pastorale du col des Faïsses.
Barre rocheuse de la base des cailloutis anciens (ils forment tout le versant de la crête des Faïsses, en arrière-plan) ; s0 = litage des cailloutis.




affleurement de cailloutis anté-rissiens, vu du sud; en bordure de la piste pastorale du revers sud du col des Faïsses.
s0 = litage des cailloutis


 

 


Carte géologique simplifiée du Dévoluy septentrional
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M. Gidon (1977), publication n° 074

cartes géologiques à 1/50.000° (*) à consulter : feuille Saint-Bonnet
complétez votre exploration géologique de cette montagne en visitant la page "versant ouest de l'Obiou"


Mens Le Châtel
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