Grand Roc Noir, La Rocheure
le chaînon de rive droite de la Haute Maurienne en amont de Termignon

Le Grand Roc Noir est l'un des grands sommets de Vanoise, le plus méridional du chaînon de rive droite de la Haute Maurienne en amont du confluent du Doron de Termignon : il y domine la vallée de l'Arc, sur la transversale des villages de Lanslebourg et de Lanslevillard. Son versant septentrional constitue la rive gauche du vallon aval de la Rocheure (voir la partie amont de ce dernier à la page "Méan Martin").

1/ La crête occidentale de ce chaînon se termine, au nord du village de Termignon, avec la pointe du Grand Vallon, dont le versant ouest est sculpté par les ravins de rive gauche du torrent de la Chavière, qui s'élève vers le nord depuis Termignon jusqu'au plateau de Bellecombe (voir la page "Chasseforêt"). Ce versant donne une section naturelle presque N-S, relativement orthogonale aux structures, ce qui permet de mieux en analyser les rapports.

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Le vallon de la Chavière de Termignon vu du sud-ouest, depuis la Turra d'Aussois (pentes sud-orientales de la Dent Parrachée).
f.B = faille de Bellecombe ; ØCh = surface de chevauchement basale des nappes de schistes lustrés ligures ; n.Ch = nappe du Charbonnel ("SLc" = schistes lustrés à lits de calcaires marbreux) ; n.gV = nappe du Grand Vallon ("SLf" = schistes lustrés à lits de grès, de type "flysch") ; f.rC = faille du ravin de Chavière ; n.G = "nappe des gypses" ; "rv" = lentilles de Roches vertes.

Les pentes méridionales qui tombent sur la vallée de Lanslebourg sont formés sur toute leur hauteur par des schistes lustrés. Mais au niveau de la selle de La Turra de Termignon (arête sud-ouest) le faciès de ces couches change : les schistes à strates plus ou moins gréseuses, organisées à la façon des flyschs*, qui affleurent au dessus sont remplacées, en contrebas, par des faciès de calcschistes à bancs calcaires qui forment un talus plus raide. Les auteurs récents (Deville E., 1987) considèrent que ce changement correspond à la superposition de deux nappes, la plus haute étant la "nappe du Grand Vallon" et l'inférieure celle "du Charbonnel".

voir l'exposé sur la nomenclature des nappes de schistes lustrés ligures

2/ Le versant septentrional du chaînon, c'est-à-dire la rive gauche du vallon aval de la Rocheure comporte deux niveaux.

a) Les hautes pentes du versant au dessus du replat des lacs de Lanserlia révélent que la surface tectonique qui sépare les deux ensembles rocheux ci-dessus distingués ne correspond pas à un simple empilement : elle a un dessin complexe, tel que la nappe inférieure (du Charbonnel) est rebroussée par dessus celle du Grand Vallon dans les abrupts du sommet de Grand Roc Noir, en décrivant le flanc inverse d'un anticlinal couché déversé vers le S-SW et d'axe oblique à la crête.

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Le Grand Roc Noir (face nord) vu de l'ouest - nord-ouest, depuis le col 2855, au sud-ouest de la Pointe de Lanserlia
n.Ch= nappe du Charbonnel (SLc = schistes lustrés à lits de calcaires marbreux) ; n.gV= nappe du Grand Vallon (SLf = schistes lustrés à lis de grès, de type "flysch").
La vue est prise à peu près dans l'axe du pli couché qui reploie ensemble les deux nappes.

b) Par contre à l'ouest et au nord des lacs de Lanserlia ce sont les schistes lustrés de la nappe inférieure (du Charbonnel) qui affleurent et qui forment notamment l'Aiguille de Lanserlia. Dans le versant ouest de cette dernière ils reposent, par l'intermédiaire d'une lame de cargneules, sur les calcaires argileux sombres lités du Lias de la série de la Grande Motte.

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Le vallon de la Rocheure, vu du sud-ouest depuis la Pointe de Lanserlia (ce cliché fait suite au précédent, vers la gauche).
ØSL = surface de charriage des nappes "ligures" (de schistes lustrés) ; n.MM = unité de Méan Martin ; n.Sa = unité de la Sassière ; n.Ch = unité du Charbonnel.

Ce sont aussi ces couches qui constituent les deux éperons rocheux symétriques des Rochers de Lanserlia et de Pierre Brune, lesquels encadrent le débouché aval du vallon de la Rocheure, là où il rejoint celui de la Leisse à Entre-Deux-Eaux pour former le Doron de Termignon.

Ces couches forment une grande dalle épaisse de plus de 100 m, assez régulièrement pentée vers l'est, qui est sculptée par le ravinement en aiguillettes spectaculaires aux Rochers de Lanserlia. Elle est garnie à son sommet par une mince couverture stratigraphique normale, formée de calcaires du Malm, de marbres en plaquettes et même de flysch noir briançonnais (sa semelle de dolomies noriennes affleure également dans le soubassement des falaises du Turc).
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Le bas vallon de La Rocheure, vu du sud, depuis la Pointe de Lanserlia (suite, vers la gauche, du cliché précédent). Le débouché aval du vallon, qui traverse le socle cristallin, est masqué par les Rochers de Lanserlia (2886, 2852), qui en constituent la rive gauche.
ØgM = surface de charriage de la nappe de la Grande Motte ; ØSL = surface de chevauchement du coussinet basal des nappes de schistes lustrés ligures (elle s'enfonce sous les pieds de l'observateur) ; n.Ch = unité de Charbonnel ; a.L = anticlinal des Lombards (ce pli, déversé vers l'est, "enroule" la surface de charriage de la nappe de la Grande Motte).

Cette dalle, apparemment monoclinale (mais affectée de multiples microplis), s'enfonce doucement sous les schistes lustrés des nappes liguro-piémontaises de la Sana (côté est) et du Grand Roc Noir (côté sud), par l'intermédiaire d'une lame de gypses et de cargneules. Cette dernière est particulièrement épaisse et bien visible dans le versant nord de la Pointe de Lanserlia, mais elle est par contre presque totalement masquée par les éboulis dans le versant ouest de ce sommet.

c) Le soubassement des falaises du Lias de la nappe de la Grande Motte, plus ou moins fortement garni d'éboulis calcaires à leur pied, est essentiellement formé par des micaschistes. Ceux-ci supportent cependant une mince succession jurassico-éocène qui débute directement par les calcaires du Malm comme aux environs du col de la Vanoise.

Les affleurements de ces micaschistes atteignent sous le sommet de Pierre Brune une altitude nettement supérieure à celle qui est la leur en rive ouest du Doron et du Torrent de la Leisse. Ils se terminent en direction de l'est, dans les pentes des Lombards (au dessus des chalets de Pierre Blanche), par une charnière anticlinale déversée dans ce sens (c'est-à-dire de façon "rétroverse").
Pour expliquer cette disposition les auteurs de la carte géologique (Dondey H., 1986, Deville E., 1987) ont considéré que ces micaschistes sont détachés de la masse principale du socle cristallin de la Vanoise orientale par une imbrication, l'"écaille des Lombards", qui s'y encapuchonne sous les autres unités imbriquées .

Cette interprétation de cet épaississement du socle cristallin comme l'effet d'un chevauchement s'appuie sur la présence, en rive nord du vallon de la Rocheure, quelques 200 m en contrebas de la surface sommitale des micaschistes, d'une bande de grès et de schistes du Permien qui affleure à mi-pente des abrupts dominant Entre-Deux-Eaux, au dessus de la masse principale du socle cristallin de l'Arpont (voir le cliché ci-dessus).


Coupe W-E très schématique, au niveau du Plan du Lac, d'après Deville E., 1987, in Debelmas et Desmons, 1997 (la présentation est fortement retouchée et le dessin légèrement modifié ; mêmes couleurs que sur les cartes schématiques ci-après).
ØgM, ØSL = chevauchements proverses de la nappe de la Grande Motte et des schistes lustrés ; ØeL = rétro-chevauchement tardif de "l'écaille des Lombards" : il semble, en fait, être recoupé, au Plan du Lac, par la faille verticale de Bellecombe (non identifiée par les auteurs).

Il semble que ce soit cet accident qui se poursuit, en rive sud de la Rocheure, par un étroit couloir très redressé, à remplissage liasique, qui sépare les bosses 2266 et 2232 des abords nord de la ferme de Pensamen, à l'extrémité septentrionale du plateau d'alpages du Plan du Lac.

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Les Rochers de Lanserlia, vues du nord-ouest, depuis le chemin montant depuis Entre-Deux-Eaux (cliché obligeamment communiqué par M. Bernard Genre).
ØSL = chevauchement des schistes lustrés de la nappe du Charbonnel ; ØgM = chevauchement du Lias-Jurassique de La Grande Motte sur le socle cristallin des Lombards ; f.B = faille de Bellecombe, limitant vers l'ouest l'extension de ce socle.

C'est en effet là que débute, au pied des pentes du soubassement des Rochers de Lanserlia une bande de cargneules, que bordent à l'est des lambeaux de terrains triasiques et liasiques. Elle détermine le replat N-S de la chapelle Saint-Barthélémy et du refuge du Plan du Lac et limite du côté est affleurements de micaschistes du "plateau" de Bellecombe.

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La partie méridionale du plateau de Bellecombe, vue plongeante depuis le sommet de Lanserlia.
n.gM = matériel de la nappe de la Grande Motte ; éc.L = matériel ( micaschistes) de l'écaille des Lombards ; ØSL = surface de charriage de la nappe de schistes lustrés ligures du Charbonnel ; f.B = faille de Bellecombe.

Au sud du Plan du Lac cette faille limite du côté oriental les cargneules qui recouvrent le revers oriental de la zone bosselée du "plateau" de Bellecombe qui sont interprétées comme cargneules de la base de la nappe de la Grande Motte et leur juxtapose des affleurements de Lias supportant un chapeau de micaschistes qui prolonge clairement l'écaille des Lombards. En définitive cette disposition des affleurements s'explique aisément par le jeu vertical tardif de la faille de Bellecombe, lequel consiste en un abaissement de sa lèvre orientale (voir la page "Chasseforêt").

Ces données permettent de comprendre comment se fait la terminaison vers le sud de l'écaille des Lombards. Par contre le prolongement septentrional de cette dernière, sous la Grande Casse en rive droite du vallon de la Leisse, est beaucoup plus énigmatique, car il semble y buter contre la surface de chevauchement de l'Unité de La Grande Motte et peut-être même passer dessous (voir les pages "Col de la Vanoise" et "Pelve").

En fait l'endroit où cela se produit, juste en amont du confluent du ruisseau qui descend du col de la vanoise, se situe malencontreusement au point de convergence des quatre cartes géologiques couvrant le massif. Or la confrontation de ces documents aboutit à une ambiguité, voire un désaccord, quant aux tracés des limites entre les quartzites triasiques, le Permo-Trias et leur socle cristallin.

 

aperçu général sur la Vanoise

cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille Lanslebourg

c
Carte géologique schématique des abords du Grand Roc Noir
(fond topographique I.G.N. au 1/250.000°)
Légende des couleurs


Mont Pelve

vallon de La Leisse

La Sana
Chasseforêt

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