Lac de la Girotte, Val Joly, crête des Enclaves

ravins des sources du Dorinet (versant rive gauche de la vallée d'Hauteluce)

La vallée du Dorinet, qui conflue avec celle du Doron peu en aval de Beaufort, s'élève vers le NE en direction du col du Joly. Elle s'inscrit d'abord, jusqu'à Hauteluce, dans le socle cristallin (micaschistes clairs) du rameau externe de Belledonne, dont le toit (surface de la pénéplaine anté-triasique) s'enfonce sous le niveau du fond de vallée et qui disparaît donc vers le nord. À l'emplacement du pied de station de Val Joly (abords du village du Planey) la vallée s'épanouit car elle correspond alors au rassemblement, en patte d'oie, des torrents qui drainent les alpages du versant SW de la crête du col du Joly.

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La vallée amont du Dorinet, vue depuis ses pentes de rive droite au dessus de Hauteluce (abords du hameau des Culas sur la D.218, 3 km au sud-est des Saisies). (suite de ce paysage, vers la droite, à la page "Outray").
u.J = unité du Joly ; u.mA = unité du Mont d'Arbois ; gr = pointement granitique du Planay ; a.mB = accident médian de Belledonne ; f.S = faille du Sallestet ; ØR = chevauchement de Roselend ; f.Co = faille de la Commanderie.

Le lac de retenue de la Girotte, suspendu en rive gauche de la vallée du Dorinet, est situé à l'emplacement d'un ancien lac naturel plus petit dont le niveau a été surélevé par un barrage. Ce barrage ressemble curieusement, lorsqu'on le voit de la vallée, à un mur couronnant une crête, car il est installé sur un épaulement rocheux très marqué mais très faiblement échancré par l'ancien déversoir du lac.

L'architecture du barrage, imposée par sa situation très surplombante au rebord supérieur du bas versant, est assez originale puisque cet ouvrage n'est pas constitué d'une voûte unique mais d'un enchaînement de petites voûtes appuyées sur des piliers intermédiaires, au nombre de 18 (voir cette architecture sur les autres clichés de cette page).


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Le lac de la Girotte et la Crête des Enclaves vus du nord, depuis l'Aiguille Croche (voir le revers opposé de la crête des Enclaves à la page "Gittes")
f.cG = faille du col de la Gitte ; f.S = faille du col du Sallestet ; s.G = pincée synclinale de La Girotte.
Le bloc d'Outray se rattache au prolongement septentrional du "rameau interne" de Belledonne (voir la page "Outray") : ici la surface de son socle cristallin s'enfonce, de droite à gauche, sous sa couverture sédimentaire avant de buter contre l'"accident médian" dans le ravin du Planey, en rive opposée du Dorinet (hors du champ du cliché).
On voit bien le ploiement en voûtes de la surface de la pénéplaine anté-triasique (en tirets rouges) des deux blocs cristallins de la Pierrière et des Enclaves, qui sont tout juste décapés de leur couverture sédimentaire (la voûte de ce dernier s'enfonce vers le nord, au point de disparaître sous sa couverture triasique en atteignant la vallée du Dorinet).
Entre les deux s'intercale la pincée synclinale de La Girotte qui est le remplissage sédimentaire originel de l'hémigraben oriental d'Outray : elle y est écrasée et replissée en incluant des lames anticlinales de son soubassement houiller.

Les plis d'entraînement, visibles dans le Lias de l'appui est du barrage, témoignent, par leur sens de déversement, de ce que la faille qui limite le bloc occidental d'Outray a rejoué lors des compressions alpines dans le sens du soulèvement de ce dernier bloc (c'est à dire à l'envers du fonctionnement en chevauchement supposé par les tenants d'une surrection des blocs par une tectonique de failles inverses dans le socle)

La crête des Enclaves qui domine le lac du côté sud-est correspond à la voûte anticlinale d'un bloc de socle cristallin, tout juste décapée de sa couverture. De celle-ci il y subsiste encore des lambeaux sur la crête même, sous forme d'une dalle de grès triasiques que coiffent des chapeaux de grès triasiques et de cargneules.


La partie septentrionale des rochers des Enclaves (point coté 2446) vue du sud, depuis le sommet des rochers des Enclaves.
Les tirets rouges soulignent la surface de la pénéplaine anté-triasique. La discordance des terrains secondaires sur leur soubassement cristallin est clairement indiquée par l'attitude de la foliation (fo) des schistes cristallins. On notera aussi la schistosité (s1), pentée à 45° E, qui affecte les grès triasiques : cette déformation (post-triasique donc) témoigne des efforts cisaillants subis par la couverture (mouvement relatif en direction de l'ouest par rapport au socle).

Sur chacun des deux flancs de cette voûte on trouve un sillon, rempli de cargneules et de dolomies, qui a l'aspect d'une pincée synclinale dont les flancs deviennent très fortement pentés vers le bas. Du côté ouest ce remplissage se complète, au nord du col du Sallestet, par un peu de Lias calcaire qui vient en contact direct avec le socle cristallin du bloc d'Outray par l'intermédiaire de la faille verticale du Sallestet (voir la page "Outray").
Cette structure du socle indique que le sillon du Sallestet correspond à un ancien fossé d'effondrement, d'âge sans doute jurassique, que l'on peut considérer vraisemblablement comme le fond d'un ancien hémigraben, de second ordre, greffé sur le flanc oriental de l'hémigraben principal de l'accident médian de Belledonne.

Ce "synclinal" de La Gitotte a a été rétréci par compression, ce qui a plissé son contenu et redressé ses bordures ; mais il n'a pas été déformé en chevauchement par un cisaillement* à vergence* ouest, à la différence de ce que l'on observe dans les terrains sédimentaire qui le recouvraient et que l'on voit encore affleurer plus au nord-est dans le secteur du col du Joly (voir les coupes ci-dessus et consulter la page "col du Joly").

L'épaulement sur lequel s'appuie le barrage correspond à l'extrémité septentrionale du chaînon d'Outray, qui se confond sensiblement ici avec la voûte de la coupole de socle cristallin qui constitue la partie la plus occidentale de ce bloc. En effet celle-ci-s’abaisse doucement vers le nord sous son enveloppe de terrains sédimentaires, de sorte que l'appui occidental du barrage et l'essentiel de son mur sont fondés sur le cristallin (micaschistes chloriteux) tandis que son appui oriental et les rives de la retenue sont principalement constitués des terrains sédimentaires les plus anciens (Trias et un peu de Lias) de la couverture du bloc de socle, pentée globalement vers l'est.

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La montagne d'Outray et le Lac de la Girotte vus du N-NE, depuis le col du Joly.
f.S = faille de Sallestet ; s.Girotte = dépression synclinale de La Girotte ; f.Co = faille de la Commanderie (au revers de la bosse 1926 elle se branche à angle aigu sur l'accident médian de Belledonne).

 Dans le détail cette Pincée synclinale de la Girotte correspond à la couverture sédimentaire orientale du bloc d'Outray. Elle est accidenté de failles (la plus part à peu près N-S) qui font affleurer des bandes de houiller qui s'intercalent sur les deux rives du lac entre les bandes de cargneules triasiques. La bande houillère la plus orientale est enfin limitée du côté est par la faille du Sallestet. qui abaisse en rive SE du lac les couches triasiques enveloppant le flanc ouest de l'anticlinal de socle des Enclaves. Cette dernière représente très vraisemblablement une ancienne cassure extensive qui délimitait le petit hémigraben du col du Sallestet, dont le substratum cristallin correspond au revers est du massif d'Outray.


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Le lac de la Girotte vu du sud, depuis les rochers des Enclaves.
ØJ = surface de chevauchement de l'unité du Joly ; f.S = faille du Sallestet (séparant le bloc des Enclaves de celui d'Outray) ; u.Vo = unité ("écaille") de Vorès ; u.A = unité d'Annuit.
Le cristallin du bloc de socle d'Outray occidental (à l'ouest du hameau de la Ruelle) affleure largement dans les pentes (masquées) qui tombent, depuis le barrage, vers la vallée du Dorinet.

Le domaine skiable de la station de Val Joly s'étend dans les pentes d'alpages situées au nord et à l'est du barrage, au pied de l'aiguille Croche et sous le col du Joly. Les ravins qui s'y réunissent pour former le Dorinet ne mettent plus guère à nu le socle cristallin car la voûte des blocs constitués par ce dernier s'enfonce vers le nord. Au contraire ils entaillent leur couverture sédimentaire, qui s'avère affectée d'un structure isoclinale*, c'est-à-dire avec un pendage moyen à peu près constant (ici proche de 20 à 30° vers le sud-est), en dépit de répétitions des couches qui témoignent de déformations tectoniques par plis ou par chevauchements (voir la page "Aiguille Croche").

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Le barrage de la Girotte et le fond du haut vallon d'Hauteluce vus du sud-ouest, depuis la rive occidentale du lac (chalets de Vers le Lac).
ØJ = surface de chevauchement de l'unité du Joly, prolongeant a.mB = extrémité septentrionale de l'accident médian de Belledonne (faille occidentale du bloc d'Outray).
Le bloc de socle d'Outray (micaschistes et houiller), sur le revers est duquel s'appuie le barrage, se termine en plongeant doucement sous les terrains sédimentaires dans les basses pentes de l'Aiguille Croche : les tirets rouges soulignent le tracé de la surface de la pénéplaine anté-triasique.
Arrière-plan extrêmement simplifié : voir la page "Aiguille Croche" . L'astérisque rouge désigne l'emplacement des affleurements qui y sont en outre étudiés.

En définitive ce secteur présente, sous l'angle tectonique, l'intérêt de montrer de façon particulièrement évidente le contraste entre la tectonique du socle cristallin, débité par des cassures très redressées et celle de sa couverture sédimentaire, où la déformation des couches correspond à un transport chevauchant avec étirement sub-horizontal.


Schéma d'ensemble de la structure du secteur au sud-est de Megève.
pour améliorer la lisibilité les hauteurs ont été exagérées selon un facteur proche de 2 fois.

u.J = unité du Mont Joly ; u.mA = unité du Mont d'Arbois ; u.S = unité du Sangle ; u.R = unités de Roselette et de Roselend.
f.S = faille de Sallestet ; a.mB = prolongement septentrional de l'accident médian de Belledonne.
Les indications Outray, Enclaves et Grande Pierrière désignent les blocs de socle à voûte ployée en anticlinal ("claveaux") de la partie interne du socle cristallin de Belledonne.



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Les rapports cristallin-sédimentaire en Beaufortain nord-occidental, vus du SW depuis un avion de ligne (cliché original obligeamment communiqué par M. Philippe Journet).
f.C = faille de Chamonix ; a.mB = accident médian de Belledonne ; en bleu le matériel sédimentaire dauphinois , en jaune le socle cristallin (à l'extrême gauche le bloc des Aiguilles Rouges) ; tirets roses : surfaces de chevauchement.
Les failles extensives limitant les petits blocs qui découpent le rameau interne de Belledonne sont masqués sous les plis de la couverture sédimentaire entre vallée du Dorinet et Val Montjoie (sous le chaînon du Mont Joly). Quant au bloc du Mont Blanc il se prolonge en direction du sud sous le sédimentaire de l'Unité de Roselend, plus à l'est que ces blocs du rameau interne de Belledonne.


voir aussi l'Aperçu d'ensemble sur la structure du secteur Megève - Val Montjoie


carte géologique au 1/50.000° à consulter : feuille Saint-Gervais


Carte géologique simplifiée

redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074
N.B. le figuré "Permien" correspond ici aux couches de base (grès etc ...) du Trias.

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