Grand Galbert, Rochetaillée
le promontoire septentrional du chaînon du Taillefer

La montagne du Grand Galbert représente l'extrémité septentrionale du chaînon du Taillefer. C'est pour contourner ce puissant éperon rocheux que la vallée de la Romanche se coude brutalement, à Rochetaillée, pour passer de la plaine de Bourg-d'Oisans (orientée presque S-N) à la gorge de la Basse Romanche (orientée NE-SW)

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L'extrémité septentrionale du chaînon du Taillefer vue du sud, depuis un avion de ligne. (cliché original obligeamment communiqué par M. Marcel Lemoine) .
en rouge
les affleurements triasiques des crêtes du Taillefer, qui correspondent à autant de fragment conservés de la pénéplaine anté-triasique. Le glacis du Grand Galbert, qui descend en pente douce vers le sud, est aussi un fragment de la pénéplaine anté-triasique, abaissé par la faille du Taillefer qui détermine les abrupts du versant masqué de ce sommet.
On retrouve d'autres fragments de cette pénéplaine, fortement décalée vers le haut, sur l'épaule ouest du Taillefer (versant sud de la crête de Brouffier, qui se profile devant les bois du plateau des lacs du Poursollet).
Les alternances de niveaux de micaschistes et de conglomérats métamorphiques du socle cristallin, redressés à la verticale par l'orogenèse hercynienne, déterminent le relief de crêtes et de ravins de la face sud du Taillefer.
a.MB = accident médian de Belledonne ; f.BE = faille orientale de Belledonne (et faille du col d'Ornon).


Le sommet du Grand Galbert (2561) est constitué par un chapeau isolé d'amphibolites, sans doute à rattacher à la nappe ophiolitique de Chamrousse comme celui de la Cime de Beauregard. Il couronne les abrupts de la partie amont de la rive gauche de la gorge de la Romanche. Ces abrupts, symétriques de ceux du revers sud-oriental de la crête de Belledonne, montrent le même système de failles mais il y est plus difficile à voir, en raison de l'important couvert forestier. Mais dès que l'on débouche sur le plateau qui s'étend au revers sud-est de la Cime Chalvine et qui porte les lacs du pied septentrional du Taillefer on y retrouve des failles dont les tracés poursuivent de façon assez évidente ceux de la Petite Vaudaine et des Lessines.

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Les pentes supérieures de rive gauche des gorges de la Romanche, vues du nord depuis le sommet (tables d'orientation) de la Croix de Chamrousse.
f.E = faille de l'Échaillon (= faille de la Petite Vaudaine) ; f.LP = faille de La Pra ; f.B = faille de la Barrière (=faille des Lessines).
voir les prolongements de ces fractures sur le plateau des lacs supérieurs du Poursollet, à la page "Lac Fourchu".



La faille de la Petite Vaudaine se prolonge par celle du ravin de l'Échaillon et celle des Lessines par celle des chalets de La Barrière. En ce qui concerne la faille de la Pra son prolongement vers le sud est moins clair car il aboutit sous la Pointe de l'Aiguille, dans un secteur où le côté nord-ouest de cette crête est affectée par un début de tassement en masse. En fait on ne trouve sur le palteau des lacs supérieurs auun tracé qui semblecorrespondre à son importance : il semble donc qu'elle doit se raccorder à celle des Lessines, aux environs des chalets de la Barrière pour ne plus constituer qu'une cassure unique, la faille de la Barrière.

Au sud du plateau des lacs les données cartographiques existantes ne permettent guère de savoir selon quel tracé ces failles se poursuivent dans les crêtes du Taillefer, au sud du chevauchement du Taillefer, mais l'importance de leurs rejets fait que cette prolongation y paraît a priori inévitable.


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Les pentes de rive gauche de la Romanche entre Rioupéroux et Gavet, vues de l'ouest, d'avion.
ØOph (en bleu émeraude) = surface de charriage de la nappe des Ophiolites de Chamrousse ; f.B (en rose) = faille de la Barrière (prolongement sud de la faille des Lessines) : elle surélève le compartiment arrière (plateau du lac Fourchu) par rapport au compartiment avant (plateau du Poursollet).
Entre les ravins de Rioupéroux et des Clavaux le versant a très anciennement glissé en entier et constitue, de ce fait, un énorme paquet tassé* dont la base est entaillée par le lit de la Romanche. La crevasse d'arrachement principale (soulignée par une ligne de tirets barbulés) correspond à l'escarpement qui domine le replat mamelonné appelé "Les Collines". Cette masse rocheuse est, bien sûr, disloquée par des crevasses de second ordre, qui sont maintenant remplies par des éboulis qui dessinent des zones déboisées en demi-lune, à flanc de versant.


À l'ouest de la faille de la Barrière les pentes qui s'élèvent depuis le lit de la Romanche jusqu'au rebord du plateau du Poursollet sont formées uniquement par les orthogneiss clairs du complexe volcano-plutonique de Rioupéroux

 Elles sont affectées par un important glissement de terrain qui détermine de larges crevasses colmatées d'éboulis au sommet et au flanc de ce versant. Il est totalement colonisé par la végétation et ne montre aucun indice de mouvements récents mais sa présence (qui n'avait encore jamais été signalée) est susceptible de perturber les résultats qui pourraient être obtenus en cas d'une étude précise de la structure de ce versant.

En ce qui concerne l'origine de la gorge de la Romanche il faut remarquer qu'elle recoupe les tracés des grandes failles dont il a été question ci-dessus, sans que ces derniers (qui lui sont presque orthogonaux) soient décalés de façon perceptible d'une rive à l'autre : cela démontre clairement que le cours de la rivière n'a pas été guidé par une cassure (et surtout pas par un décrochement).
L'origine de la localisation de cette entaille est donc plutôt à rechercher dans le sens d'une antériorité de son tracé par rapport à la surrection du massif cristallin : il correspondrait vraisemblablement à celui du cours d'une "paléo-Isère" qui, descendant des abords de Briançon, amenait dans son delta miocène de Voreppe - La Côte-Saint-André des galets provenant du domaine piémontais (radiolarites).

Du côté nord-oriental la crête NE du Grand Galbert se poursuit en dominant la Romanche jusqu'à la Cime de Cornillon, où elle s'abaisse brutalement pour déterminer l'éperon de Rochetaillée que contourne le coude de la vallée de la Romanche. Les affleurements de socle cristallin de la gorge de la Romanche se terminent brutalement à cet endroit pour faire place à la plaine de Bourg-d'Oisans parce qu'ils sont coupés transversalement par l'abrupt N-S de la faille du col d'Ornon.

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Le paquet tassé des Clos, à l'ouest des Sables en Oisans, vu du nord-est, depuis la digue de la retenue d'Allemont (barrage du Verney)
Le matériel cristallin effondré et sa frange inférieure d'éboulis masquent le tracé de la faille du col d'Ornon, qui traverserait la pente en biais pour aboutir à Rochetaillée.


Mais il faut aller sur ce versant jusqu'au ravin du Treuil, au pied de la crête du Fort, pour voir que les escarpements du versant est de la Cime de Cornillon sont affectés par cette faille et voir affleurer les terrains sédimentaires qui s'appuyent contre elle.

Cela vient de ce que le tracé de la faille, qui devait s'élever dans ce versant, en diagonale vers le sud en direction du village d'Oulles, est masqué par l'important et spectaculaire amas d'énormes panneaux de matériel cristallin des Rochers des Clos . Il s'agit d'un énorme paquet tassé* dont certains éléments sont découpés en clochetons car ils ont été disjoints lors de leur glissement. Le replat des Clos lui-même (au pied de la cime de Cornillon) et la combe de Farfayet représentent la crevasse, en grande partie colmatée d'éboulis, selon laquelle ce paquet rocheux s'est détaché.


Le paquet tassé des Clos, à l'ouest des Sables en Oisans, vu du sud, depuis La Paute.

Comme la plupart des tassements de flancs de vallée ce glissement de terrain a probablement été déclenché par le retrait du glacier würmien. En effet, lors de son passage, la glace qui rabotait le flanc de la vallée a dû contribuer à remettre à nu le miroir de faille en déblayant les terrains sédimentaires qui s'appuyaient sur lui. Cela a rendu le versant particulièrement abrupt et donc instable lorsqu'il n'a plus été épaulé par la masse de glace.

Le versant méridional du Grand Galbert s'abaisse progressivement pour former une vaste étendue mamelonnée, à relief et paysage très nordique (surtout l'hiver ...), qui porte, disséminés sur toute sa surface, une multitude de lacs plus ou moins petits (lac de l'Agneau, du Grand Pré, de la Jasse, etc ...) et qui se termine vers le SW au Pas de l'Envious et au Lac Fourchu (voir la page "Lac Fourchu").


La partie septentrionale du plateau méridional du Grand Galbert, vue du sud-ouest depuis le lac du Grand Pré.

La longue surface, globalement presque plane, de ce "plateau méridional du Grand Galbert" s'est modelée, vraisemblablement comme celle du plateau du Poursollet, par la remise à nu, au quaternaire de la surface de l'ancienne pénéplaine anté-triasique. C'est d'ailleurs ce dont attestent les affleurements de Trias, formant autant de petites buttes-témoins, que l'on trouve dans sa partie méridionale, à la Jasse ainsi qu'à l'ouest du Lac Fourchu (ils sont formés de bancs de dolomies brunes qui reposent sur le socle cristallin par l'intermédiaire de quelques décimétres de grès à ciment dolomitique).

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Le plateau des lacs du Taillefer vu du sud, depuis le sommet principal du Taillefer.
f.T = faille du Taillefer (faille inverse) : elle abaisse le plateau des lacs par rapport aux crêtes sommitales du Taillefer) ; f.B = faille de La Barrière (extensive) : elle abaisse son compartiment occidental (qui porte les lacs inférieurs) ; f.J = faille de la Jasse ; f.E= faille de l'Échaillon.
gn.la = gneiss leptynitiques à lits amphiboliques ; ms+cg = micaschistes à conglomérats de la formation du Taillefer (schl = schistes chloriteux ; msn = schistes noirs).


Depuis le sommet du Grand Galbert se détache vers le sud l'échine de la montagne de la Séa, qui domine Oulles du côté est et qui s'abaisse progressivement jusqu'au refuge du Taillefer. Au delà elle est tranchée par l'entaille de la Jasse que draine le Rif Garcin, qui descend sur La Grenonière d'Ornon (voir la page "Ornon"). Cette crête de la Séa est séparée du "plateau des lacs", qu'elle domine nettement, par le ravin de l'Échaillon qui s'encaisse selon un tracé N-S avant de déboucher du côté sud peu à l'ouest du refuge du Taillefer. Ce ravin s'avère suivre une faille extensive N-S, à regard ouest, la faille de l'Échaillon, dont la présence explique la surélévation de l'échine de la Séa par rapport au plateau du Lac Fourchu.

La partie amont du ravin de l'Échaillon vue du sud-ouest
f.E = faille de l'Échaillon.
Les gneiss leptynitiques clairs (à rares bancs d'amphibolites) ont des litages presque verticaux que l'on voit changer d'azimut selon un dessin antiforme qui affecte aussi le contact avec les amphibolites qui forment la pyramide sommitale du Grand Galbert. Ces dernières représentent une klippe rattachable à la nappe ophiolitique de Chamrousse.



 Deux constatations le confirment :
- D'une part, dans sa partie haute, le fond de ce ravin suit une bande de roches fortement rubéfiées, souvent mylonitisées* qui sépare les amphibolites du sommet du Grand Galbert des gneiss clairs de la Cime Chalvine.
- D'autre part, plus bas, peu au nord du refuge du Taillefer, on observe en deux points des affleurements de dolomies triasiques. Ils reposent stratigraphiquement sur le cristallin de sa rive ouest, par l'intermédiaire de brèches à éléments cristallins et à ciment dolomitique (mais selon un contact très incliné vers l'est, ce qui explique l'encaissement du ravin). Au contraire, sur la rive est le cristallin est brutalement surhaussé par la faille.



Le fond du ravin de l'Échaillon vu du sud, 500 m au nord du refuge du Taillefer
f.E = faille de l'Échaillon ; le pendage des couches du Trias est variable, souvent assez fort, mais toujours dirigé vers la droite (vers l'est) ; c'est le compartiment oriental (crête de la Céa) qui est remonté par le jeu de la faille.

Il apparaît d'autre part que cette faille se place dans le prolongement sud de la faille de la Petite Vaudaine, qui a un rejet important dans le socle cristallin du massif de Belledonne. Ici l'on constate que, si cette cassure a fonctionné après le Trias, son rejet a alors été moindre : il doit donc s'agir d'une cassure anté-triasique qui a simplement rejoué lors de l'extension jurassique.

 Le fait que, au nord du refuge du Taillefer, le contact stratigraphique de la rive ouest du ravin soit très redressé et dépourvu de grès triasiques porte à envisager que le Trias y cachète une paléofaille : la cassure serait alors double, délimitant un petit graben N-S.
Or, dans les pentes qui tombent vers le sud, depuis le refuge du Taillefer sur le replat de la Basse Montagne (voir ci- après et la page "Ornon"), la faille de l'Échaillon se prolonge très en contrebas par une étroite bande d'affleurements triasiques pincés entre deux lèvres subverticales de schistes cristallins (le sentier montant depuis Ornon la traverse vers l'altitude de 1700 m.). Cette disposition évoque effectivement celle d'un graben qui aurait été pincé par des serrages E-W.


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Les pentes de rive gauche de la Lignarre à la latitude d'Ornon vus du sud-est, depuis les pentes de la station de ski du col d'Ornon.
La surface de la pénéplaine anté-triasique (soulignée de tirets rouges) est dénivelée par plusieurs failles extensives, orientées à peu près N-S, qui ont sans doute fonctionné au Jurassique comme des satellites de la faille du col d'Ornon : f.E = faille du ravin de l'Échaillon ; f.cc = faille du chalet communal.
ØT = chevauchement du Taillefer : ici il décale le tracé de la faille du col d'Ornon dans le sens sénestre.
f.cO = faille du col d'Ornon. Cette cassure disparaît ici (passagèrement), en rive gauche du Rif Garcin, sous des affleurements de cristallin qui forment les pentes au dessus de la route sylvo-pastorale de la Basse Montagne et qui s'effile tant vers le bas que vers le sud. Cette disposition est interprétée comme le résultat de la mise en place d'un panneau rocheux glissé (olistolite), provenant de la lèvre ouest, surélevée, de la faille, pendant la sédimentation voir plus de détails ci-après.
s.O = synclinal d'Ornon : ce pli représente le prolongement septentrional du synclinal du Lac Labarre ; comme son axe est oblique à l'allongement de l'hémigraben de Bourg-d'Oisans, il se termine peu au nord, à Oulles, en sifflet contre la faille du col d'Ornon).


Sur le versant oriental de la crête de La Séa la pente s'effondre rapidement pour tomber sur le village d'Oulles, au nord, et de la Grenonière d'Ornon, au sud. Mais on y trouve encore, par exemple autour du chalet communal du Carrelet, des témoins de Trias : ils correspondent chacun au toît d'un petit bloc faisant partie d'une succession de marches d'escalier dénivelées par des petites failles N-S. Celles-ci s'apparentent sans doute à celle de l'Échaillon mais peuvent aussi être considérées comme des satellites de la grande faille du col d'Ornon, qui traverse le versant peu en contrebas, vers l'altitude de 1800 m (en passant peu à l'ouest d'Oulles).

 

Page d'introduction à la géologie de la chaîne de Belledonne au sens large.
aperçu d'ensemble sur le massif du Taillefer

Cartes géologiques au 1/50.000° à consulter : feuille Vizille

Carte géologique simplifiée des environs sud-orientaux de Chamrousse

redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°", par M.Gidon (1977), publication n° 074
plus au nord ;
plus à l'ouest ; cartes voisines : plus à l'est
plus au sud

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