|
Gresse |
La dépression à l'extrémité méridionale se logent les villages de Gresse est ouverte en tête du cours supérieur du torrent de la Gresse, qui coule là à l'écart du sillon subalpin, mais parallèlement à lui, avant de le rejoindre plus au nord, par un tronçon W-E, à la latitude Saint-Andéol et de Lanchatre (voir la page "Brions"). Elle n'appartient cependant pas vraiment au Vercors car elle est encore dominée du côté ouest par la longue barrière de falaises urgoniennes du sommet du rebord subalpin* qui court depuis le Grand Veymont en direction de la Grande Moucherolle.
![]() Le bassin versant de la Gresse vu d'enfilade, du nord, depuis les Deux Soeurs (du sommet sud d'Agathe). a.M = anticlinal du Ménil (coeur, au niveau du Jurassique, de celui de la Moucherolle au niveau de l'Urgonien) : f.sA = faille de Saint-Andéol ; f.Q = faille de la Queyrie : f.C = faille du rocher du Cléton (prolongement oriental de celle de Carrette). Le "redoublement" de la barre Tithonique dans les pentes à l'est de Saint-Andéol est dû à un anticlinal refoulé vers l'est (vers la gauche), qui forme le mont jurassien du Ménil (voir interprétation sur le schéma ci-après). Ce pli se perd sous la couverture quaternaire, au sein des terrains marneux du Valanginien, au nord de Saint-Andéol. La ligne de tirets rouges correspond à la limite entre le Barrémien supérieur et le barrémien inférieur, au sein des calcaires bioclastiques de l'Urgonien au sens large (formation du Glandasse sensu stricto). |
En fait ce secteur du rebord subalpin présente la particularité que la barre tithonique ne soutient pas un simple replat mais est séparée du sommet de ce rebord par un vallon intermédiaire bordier. Ce dernier est fondamentalement une large combe monoclinale* ouverte dans les terrains à prédominance marneuse du Crétacé inférieur. La vallée de Gresse est ainsi limitée du côté oriental par le crêt, à faible pente, du Tithonique de la Montagne de Gresse (du Baconnet à la montagne de la Pale). Mais son relief est un peu plus compliqué, car cette combe est partiellement partagée en deux, au nord des villages, par la crête anticlinale boisée dde la montagne du Ménil (Rochers du Palais, de Château Vert et des Balmettes) qui est un "mont dérivé" séparant deux vallons N-S, celui de la Gresse (qui est un petit val synclinal ) de celui, plus occidental, du torrent des Berrièves (qui est une combe monoclinale).
Les villages de Gresse sont installés à la partie amont (méridionale) du bassin versant de la Gresse, secteur où la crête du Ménil s'efface en laissant place à des pentes régulières garnies de prairies. Le relief de ces pentes porte l'empreinte d'un remodelage par un appareil glaciaire qui, lors de la dernière glaciation, descendait de la face nord-est du Grand Veymont, obliquement à l'allongement structural de la combe des sources de la Gresse.
Au nord de la station de Gresse, au-delà des prairies que traverse le vallon W-E des Deux que, prend naissance l'échine boisée du mont* anticlinal séparant les deux vallons parallèles. La voûte de Tithonique de l'anticlinal du Ménil émerge là de l'enveloppe de marno-calcaires et de marnes qui la masque plus au sud, aux abords de Gresse. Elle gagne doucement en altitude vers le nord jusqu'aux rochers du Palais et de Chateau Vert, où elle commence à être un peu disséquée par l'érosion, puis se poursuit presque horizontalement jusqu'à la latitude des Rochers des Baumettes.
Mais immédiatement au nord de ces derniers la charnière du pli subit un décalage vers l'ouest occasionné par le fait qu'il y est traversé par le prolongement SE de la faille de Carrette (lequel franchit l'Urgonien au Pas Ernadan puis les couches de base du Crétacé au village de Bourgmenu). Ce fait témoigne d'ailleurs clairement du jeu en décrochement sénestre de cette relativement importante cassure. En outre sa charnière tithonique s'en trouve abaissée jusqu'à se dessiner à une altitude peu supérieure à celle du lit du torrent de Berrièves et même à s'ennoyer sous la marno-calcaires crétacés peu au NE de Saint-Andéol.
D'autre part, peu en amont du confluent de ce torrent avec celui de la Gresse, le flanc oriental de cet anticlinal du Ménil se montre rompu par une cassure à fort pendage ouest qui le fait reposer le contenu berriasien du synclinal de la Gresse. On est tenté de l'interpréter comme un chevauchement à vergence est, mais il faut observer qu'elle n'occasionne aucun rebroussement des couches et que son pendage est fortement incliné vers l'ouest, contrairement à ce que l'on attendrait plutôt dans cette hypothèse. Le tracé de cette faille de Saint-Andéol se perd vers le nord (à la butte du Pey Bousou) au sein des marnes de Narbonne qui forment tout le versant du secteur de Château Bernard : sa géométrie de surface N-S pentée vers l'ouest porte à présumer qu'elle se poursuit à mi-hauteur de leur succession en direction du col de l'Arzelier (donc en occasionnant un redoublement, évidemment non discernable, au sein des marnes valanginiennes).
![]() Les crêtes nord du Grand Veymont et partie septentrionale de la dépression de la Gresse vues du sud, depuis le sommet du Grand Veymont. La barre de falaises décrit une nette incurvation en arc : cela correspond à l'enroulement de la dalle urgonienne sur le flanc ouest de l'anticlinal de la Grande Moucherolle (a.M). Le coeur tithonique de ce pli forme le mont dérivé* de l'anticlinal du Ménil, dont la crête vient redoubler, du côté ouest, la barre tithonique du véritable rebord subalpin (Montagne de Gresse). s.F = synclinal de La Fauge se prolongeant par le synclinal de La Gresse. En premier plan on peut distinguer l'obliquité de la surface d'aplanissment ("s.apl.")par rapport au pendage des couches urgoniennes ("s0") : voir à ce sujet la page "Gd Veymont". |
Du côté oriental du mont anticlinal du Ménil la rupture de la barre tithonique du flanc est du pli annonçant la faille de Saint-Andéol se manifeste déjà dans les pentes orientales du Rocher des Baumettes et jusqu'à la latitude du Château Vert : la surface de cassure (sans doute assez fortement pentée vers l'ouest) y passe à flanc de versant, nettement au dessus du fond de vallée de la Gresse, qui y creuse son lit dans les couches supérieures de la barre tithonique abaissée. Mais le rejet s'amortit aux approches de Gresse car dès la latitude du village du Chaumeil les couches chevauchées dessinent un mouvement synclinal de rebroussement, par lequel elle se raccordent presque avec celles de la retombée orientale de l'anticlinal des Rochers du Palais.
Si l'on cherche à replacer cette disposition structurale dans un contexte plus large on constate que la charnière tithonique de l'anticlinal du Ménil se place tout-à-fait dans le prolongement sud de celui de la très large voûte de l'anticlinal de la Grande Moucherolle, qui affecte, plus haut dans la succession, l'Urgonien de ce sommet (voir la page "Moucherolle") : il semble donc en représenter simplement le cœur tithonique, dénudé par l'ablation des terrains crétacés. De même on envisage sans difficulté que le synclinal de la Gresse représente l'équivalent, plus bas dans la succession, de celui de La Fauge.
Par contre on s'interroge sur ce qui pourrait représenter, au niveau de l'Urgonien, le prolongement de la faille de Saint-Andéol, car aucune cassure ne s'y manifeste qui présente la même forte inclinaison vers l'ouest. En fait on y observe deux failles de même orientation N-S qui ont des rejets d'abaissement de leur lèvre orientale, savoir la faille d'Agathe et la faille du Pas de l'Oeille (voir la page "Deux-Soeurs"). On note aussi que l'une comme l'autre ont des surfaces de cassure fortement inclinées vers l'Est et qu'elles affectent le flanc oriental du synclinal de La Fauge (et non son flanc ouest). Mais cette situation trouve une explication aisée en admettant simplement que les axes de plis sont un peu obliques aux azimuts des plans de failles, ce qui est vrai puisque les premiers sont N-S et les seconds plutôt N160.
En définitive tout cela incite à mettre en corrélation la faille de Saint-Andéol avec celle du Pas de l'Oeille, et accessoirement avec celle d'Agathe dont le rejet est plus modeste.
![]() Deux coupes schématiques du rebord subalpin du Vercors au nord de Gresse La comparaison des deux coupes montre que le redoublement de la barre Tithonique, qu'occasionne le pli faillé du coeur tithonique de l'anticlinal du Ménil, n'a rien à voir dans son attitude avec celui qui affecte la transversale plus septentrionale de Vif-Claix, dû au chevauchement de l'Éperrimont (ØE). Chronologie présumée des déformations : 1 = étape de chevauchement vers l'ouest (phases P1 et P2) ; 2 = étape des plis tardifs (phase P3, sans doute liée à un déplacement du socle de Belledonne vers le sud). (voir la publication n° 093). |
Une autre question concerne les rapports entre les vergences des structures au nord et au sud de la Grande Moucherolle |
Au sud des villages de la station de Gresse, dans les pentes qui s'élèvent vers la crête du Grand Brisou, les deux plis (anticlinal du Ménil et synclinal de La Gresse) ne se dessinent plus. Tout au plus le second s'y manifeste-t-il, sous l'aspect d'une ondulation très ouverte dont l'axe passe peu à l'ouest de son sommet principal, coté 1674 (voir les clichés plus haut dans cette page). Cette crête du Grand Brisou est orientée NE-SW (comme, plus au sud, pour celle du Mont Aiguille), c'est-à-dire d'une façon tout-à-fait oblique aux axes de plis, ce qui est original par rapport au relief général du rebord subalpin du Vercors. Cette direction est évidemment due au rôle directeur qu'a dû avoir, sur l'érosion, la grande faille de décrochement de la Queyrie, car le tracé de cette dernière passe au col de l'Allimas après avoir suivi le pied du revers sud-est de la crête du Brisou (voir la page "Saint-Michel-les-Portes").
Depuis ce col cette faille traverse en biais les douces pentes sud-orientales de la vallée de Gresse jusqu'au Pas du Serpaton, qui appartiennent au revers du crêt tithonique de la Montagne de Gresse (voir la page "Serpaton". Ces pentes sont largement garnies par un placage de marno-calcaires berriasiens mais le Tithonique y réapparaît cependant par places à l'affleurement : il y arme des nervures allongées à flanc de pente qui sont déterminées par des failles extensives, d'orientation presque N-S dont la lèvre occidentale est relativement surhaussée.
Carte géologique très simplifiée du rebord oriental du Vercors au nord de Gresse
redessinée sur la base de la carte géologique d'ensemble
des Alpes occidentales, du Léman à Digne, au 1/250.000°",
par M.Gidon (1977), publication n° 074
légende
des couleurs
![]() Gresse |